Un appareil photo comme arme contre les injustices
Zanele Muholi nait à Umlazi, un quartier de Durban, en Afrique du Sud en 1972, alors que le pays est soumis à un régime politique raciste, l’apartheid, qui ne prendra fin qu’en 1994. Si la démocratie et la nouvelle Constitution (1996), qui font suite à l’apartheid, interdisent toute discrimination fondée sur la race et l’orientation sexuelle, les personnes noires LGBTQIA+ restent la cible de violences quotidiennes. En tant que personne non-binaire racisé.e, Zanele subit de plein fouet ces discriminations. En parallèle de ses études de photographie au Market Photo Workshop à Johannesburg et, plus tard, à l’université Ryerson à Toronto, iel devient militant.e et s’implique fortement dans la vie de la communauté LGBTQIA+. Son travail photographique devient alors indissociable de son militantisme. Dans ses portraits individuels et collectifs, iel met en scène des personnes queer et racisé.es pour les révéler et questionner les stéréotypes et représentations dominantes qui y sont associées. Les personnes qu’iel photographie ne sont pas des « modèles », mais actrices de la photographie et invitées à participer en suggérant des idées de lieux, de stylisme et de pose. Adepte de l’autoportrait, l’artiste tourne également son appareil vers ellui-même pour interroger l’image de la femme noire dans l’histoire. Iel accentue volontairement le contraste de ses autoportraits pour faire valoir la noirceur et la beauté de sa peau. « Je reconquiers ma négritude, qui, selon moi, est continuellement sujette aux interprétations d’un.e autre privilégié.e. », explique Zanele Muholi. « Depuis l’esclavage et le colonialisme, les images des femmes africaines ont été exploitées pour propager l’hétérosexualité et le patriarcat blanc et ces systèmes de pouvoir ont tellement organisé notre vie quotidienne qu’il est devenu difficile de nous représenter telle que nous sommes réellement dans nos communautés respectives. »