M. Tu partages avec The Pirouettes un rapport très fort à l’enfance. Certains titres sont presque de l’ordre des comptines.
C. V. Des comptines, peut-être pas ! (Rires) Mais c’est vrai qu’il y a un peu de ça. Des mélodies à la Elli et Jacno. L’autre jour, j’entendais Arielle Dombasle dire qu’elle était restée bloquée à 12 ans. Dans mon cas, je dirais 17… Les chansons sortent comme elles sortent parce qu’elles sont directement liées à des émotions. Les mélodies ressemblent au graphique du cœur qui bat. On a tous nos propres amplitudes. La mienne est très petite comparée à celle de Mariah Carey… (Rires) On chante comme on est. Quand tu vois Flora (Fishbach, ndlr), c’est quelqu’un d’hyper intense, parfois noire et parfois dans une joie qui touche le ciel. Moi je suis plus romantique que ténébreuse, mais j’ai mes petits spleens…
M. En parlant de spleen, pourquoi le single “Nuits sans sommeil” est-il si mélancolique ?
C. V. Ça parle de la transition de vie, c’est une chanson rituelle sur le passage à l’âge adulte. Elle parle d’un arrachement à l’adolescence. J’ai tourné une page, volontairement. Je suis restée très longtemps avec un garçon, mon amour de jeunesse… J’ai eu un mal fou à le quitter. La chanson est un avant-goût de l’après. Je ne suis pas du genre à regarder les vieilles photographies, mais hier je suis retournée voir son profil. J’ai revu des photos de nous. On était jeunes. C’était tellement joli. Les titres les plus forts sont ceux qui sont liés à de vrais états physiques, à des moments importants de la vie, comme cet album de Michel Berger écrit après que Véronique Sanson l’a quitté. Un album de survie.
M. Est-ce que tu fais particulièrement attention à ce que tu vis, pour pouvoir ensuite l’écrire ?
C. V. J’essaie de ne pas trop me stresser avec ça. La musique, je l’écris facilement. C’est parfois plus dur pour les paroles parce qu’il faut avoir quelque chose à dire ! (Rires) Mais je suis traversée par plein de questions ad vitam æternam. Être une femme de 34 ans, c’est évidemment différent d’une femme de 25 ans. De nouveaux sujets arrivent. L’engagement, la famille, ce que tu as à y perdre ou à y gagner. J’ai aussi des copines qui s’intéressent au polyamour ou au total lâcher-prise sensuel… Tout ça m’intéresse. Et avec l’âge, vient une forme d’assurance aussi, qui me pousse à me dépasser. J’ai envie d’assurer. Je n’ai jamais autant bossé mon instrument.
M. Tu vois ton destin comme définitivement lié à la musique ?
C. V. C’est une belle façon d’être heureuse, et ça fait du bien à la tête et au corps. Chanter et interpréter ne me demandent pas beaucoup d’efforts, comme si j’avais une facilité à m’approprier certaines chansons. J’espère que ce n’est pas prétentieux ! J’ai une voix qui touche certaines personnes, alors autant m’en servir. Ne pas le faire serait comme avoir un don dans les mains et ne pas s’en servir pour masser. Ce serait vraiment dommage. En tournée en France jusqu’à fin novembre avec son Nuits sans sommeil Tour 2019.