Finale du défilé ERL au Pitti Uomo SS24

Chaque saison entre les fashion weeks homme de Londres et Milan, Florence se démarque avec le salon Pitti Uomo. Entre défilés de grandes maisons comme Fendi, invitée spéciale de cette édition, et de jeunes créateurs invités comme ERL, retour en 5 points sur cet événement incontournable de la mode masculine italienne.

1. L’ARTISANAT ET LA NATURE SELON FENDI
Fendi SS24

Une fois n’est pas coutume. Plûtot que d’être engorgé dans le calendrier Milanais, Fendi a cette saison préféré faire un “stand out” en allant squatter le Pitti Uomo à Florence, salon historique de la mode masculine italienne. Et pour l’occasion, Silvia Fendi a vu les choses en grand en dévoilant probablement l’une de ses meilleures collections. Déjà, elle a choisi de faire défiler la collection au sein de sa propre usine ultra-moderne de maroquinerie située dans un hameau toscan à 30 minutes de Florence. L’idée ? Rendre hommage aux artisans qui font pas mal de taf dans la réalisation des collections. Silvia Fendi a d’ailleurs déclaré : “C’est ici que notre travail se heurte à notre sens de la famille. Parfois, à l’approche d’une collection, nous demandons à nos artisans de travailler beaucoup car nous développons des prototypes et apportons des modifications à la dernière minute, et ils sont tous engagés. Dans la mode, on entend beaucoup parler du créateur et de la marque, mais pour être totalement transparent, vous devez être en mesure de savoir qui fabrique les articles et dans quelles conditions. C’est ce que nous voulons faire aujourd’hui”. Werk, Miss Thing !

Fendi SS24

Résultat, ce sont 57 silhouettes qui ont foulé le catwalk et qui se sont inspirés du craftmanship avec des vêtements de travail surpiqués et martelés qui ont été notamment reproduits en cuir. Il y avait aussi des tabliers de travail et des ceintures à outils – dont une entièrement équipée d’un ensemble d’outils traditionnels de travail du cuir – qui ont été transformés en jupes. Comme un contraste évidemment à la technique et à l’artisanat, Silvia Fendi a aussi choisi de s’inspirer de la nature environnante du lieu en faisant teindre de nombreuses pièces avec des colorants d’origine naturelle. Par exemple, les gilets et les robes en filet étaient de couleur ortie et quelques pièces de couture étaient incrustées de jacquard fleuris en relief. Le tout sans oublier la sensualité discrète propre à la maison qui s’est exprimée avec des chemises dos nu ainsi que quelques mannequins dont on pouvait apercevoir la peau à chaque hanche. Bref, une collection novatrice, aboutie et désirable. Merci qui ? Merci Fendi.

2. LE MONDE MI-RENAISSANCE/MI-GALACTIQUE D’ERL
ERL SS24

Invité spécial du Pitti Uomo, Eli Russel Linnetz (ERL pour les intimes), designer visionnaire originaire de Venice Beach à Los Angeles, a marqué avec force, imagination et audace cette saison florentine SS24. D’abord parce qu’il a présenté une collection aux accents galactiques et historiques à la fois ultra-cool, pop, (rétro-)futuriste et couture ; mais aussi et surtout parce qu’il a su raconter une véritable histoire mêlant Histoire, survivalisme, éco-anxiété et adaptabilité. En gros, il a fait son taf. Et bien. Pour son show, ERL s’est plu à imaginer un futur qui se passe en 2176 : la planète est engloutie sous les eaux. Du coup, un groupe de surfeurs de Venice Beach arrive à Florence, depuis réputée pour ses vagues de ouf. Ils se pointent dans un somptueux palais baroque, le Palazzo Corsini, qui se dresse sur les rives de l’Arno et c’est là qu’ils découvrent une garde-robe opulente tombée dans l’oubli. Résultat, les surfeurs se métamorphosent en sortes de princes futuristes néo-galactiques de la Renaissance avec des tenues sharp et glam aux reflets métalliques et argentés : chemises aux cols pointus démesurés couvertes de sequins, pantalons à pattes d’éléphants géantes, gants et chapeau haut de forme, tuxedos se prolongent dans le dos, habits de cérémonie bordés de perles, grandes vestes réhaussées d’épaulettes frangées et de décorations militaires ou encore pantalon à chaînes façon rivières de diamants. Sans aucun doute la claque esthétique du Pitti qui collerait parfaitement avec les tenues de scène de l’actuel Renaissance Tour de Beyoncé. On pose ça là.

3. LE SOUTIEN DE KERING ET S|STYLE AUX JEUNES CRÉATEUR·RICE·S
Steven Passaro FW23

Chaque année depuis sept ans maintenant au Pitti, se tient S|Style, un projet d’exposition de la Fondazione Pitti organisé par la journaliste de mode Giorgia Cantarini et qui se concentre sur de jeunes créateurs et créatrices repéré·e·s dans le monde entier qui réunissent styles expérimentaux, questions environnementales et éco-responsabilité. Point important : le projet bénéficie désormais du soutien du groupe Kering, plus particulièrement grâce à son antenne Kering Material Innovation Lab (Kering MIL) : son centre de recherche engagé dans la réduction de l’impact environnemental qui a mis sa bibliothèque de matières et de tissus certifiés à la disposition des créateurs S|Style pour la création de collections capsules. Et cocorico ! Cette année, on a compté deux français·e·s parmi les designers sélectionné·e·s : Jeanne Friot, jeune créatrice qui redéfinit la notion de genre et Steven Passaro qui déconstruit les codes du tailoring masculin. On fleek !

4. L’ÉLÉGANCE CASUAL DE BRUNELLO CUCINELLI
Brunello Cucinelli SS24

Sans le tailoring à l’italienne et Brunello Cucinelli, le Pitti Uomo ne serait pas ce qu’il est. Connu pour ses silhouettes tailleurs élégantes et classiques, Brunello Cucinelli, un membre historique du Pitti a encore frappé juste avec une collection douce et harmonieuse d’essentiels du vestiaire tailoring masculin. En somme le mix parfait entre décontracté et sophistiqué avec des couleurs fraîches et estivales ainsi que des volumes doux pour des vêtements au caractère soigneusement calibré, composés de motifs cachemire ou de tons neutres intemporels (beiges, gris, bruns…) en coton, lin ou soie. Petite nouveauté : le côté plus casual de la collection avec des t-shirts et des pulls aux coupes plus amples, des vestes de tailleur légèrement allongées et des vêtements d’extérieur et trenchs aux formes larges et fluides. Chill, quoi.

5. LES PIRATES D’AFRIQUE DU SUD VUS PAR CHULAAP
Chulaap SS24

Thaïlandais de naissance et sud-Africain d’adoption, le designer Chu Suwannapha, connu grâce à sa marque Chulaap créée en 2015, a été invité à cette nouvelle édition du Pitti Uomo pour présenter sa collection printemps-été 2024. Une collection joyeuse grâce à un mélange captivant de couleurs, de formes et de textures. Pas étonant que Suwannapha ait été surnommé le « Prince des Imprimés » par la profession. Cette dernière collection, qui comprend des imprimés inspirés de l’océan et du monde sous-marin, avec des motifs de homards et de sirènes se mêlant aux tatouages ​​de pirates, illustre parfaitement son travail puissant et ultra-créatif associé à une approche innovante. Célébration unique de l’Afrique du Sud actuelle, la collection SS24 de Chulaap rassemble donc les traditions, les techniques et les détails du batik à l’origami en passant par la broderie, le tout avec des lignes audacieuses, larges et carrées qui réinventent le costume de façon streetwear avec des blazers carrés associés à des pantalons ou des shorts. Comme ultime référence, Chulaap s’est ici inspiré des pirates, mais Suwannapha a précisé qu’il n’y aurait pas de références au style nautique ou aux films classiques de piraterie. Au contraire, « cela ressemble plus à mon imagination de ce à quoi j’aimerais que les pirates ressemblent s’ils étaient encore en vie. C’est comme un nouveau code vestimentaire pour les pirates, mettant en valeur la personnalité de chacun », a-t-il déclaré.