M. Est-ce que, d’une certaine manière, vous aviez aussi envie d’une collection plus neutre qui puisse simplifier la transition par la suite ?
D. V. N. Je ne pense pas que cette collection soit neutre du tout. Elle comprend des transparences ludiques, des effets de matières inattendus et de nouvelles techniques d’impression inspirées par la technique ancestrale japonaise du suminagashi, remontant au VIIIe siècle.
M. Peut-être que “neutre” n’est pas le bon mot. Disons “simplifiée”.
D. V. N. C’est une collection subtile, avec beaucoup de recherche et des détails importants.
M. En même temps, mettre la barre très haut avec un adieu spectaculaire pourrait rendre les choses plus difficiles pour votre successeur·e.
D. V. N. J’avais surtout envie de développer certains thèmes déjà abordés dans mes deux dernières collections homme, et je dois avouer que je suis satisfait du résultat.
M. Votre carrière compte plus de réussites que d’échecs. Avez-vous vécu des périodes difficiles où vous avez eu le sentiment de faire des choses allant à l’encontre de votre nature profonde ?
D. V. N. Quand mon associée Christine Mathys est décédée, en 1999, j’ai vécu une période assez compliquée. Les grands groupes commençaient à racheter des marques indépendantes et je me suis demandé s’il fallait vendre ou pas. La mode était devenue plus minimaliste aussi, et j’ai voulu changer de direction dans mes collections. Au final, elles n’ont pas été bien reçues et j’ai compris qu’il me fallait rester fidèle à moi-même.
M. David Bowie figurait dans la playlist de votre dernier show, et il est aussi présent dans votre défilé anniversaire femme de l’hiver 2017, ainsi que dans la collection homme présentée au musée Bourdelle en janvier 2011. Pourquoi revient-il de manière récurrente dans vos shows ?
D. V. N. Bowie est un leitmotiv dans ma vie et je me souviens très bien l’avoir vu pour la première fois à la télévision, chantant “Jean Genie” en 1972. Il était vêtu d’une combinaison moulante en jersey qui ressemblait à un collant pour femme. C’était le choc total pour moi. Avec sa coiffure punk et son make-up outrancier, c’était juste incompréhensible, j’étais face à quelque chose qui m’échappait complètement.
M. Avez-vous eu l’occasion de le rencontrer avant sa mort ?
D. V. N. Je ne l’ai jamais rencontré, et c’est très bien comme ça. Il ne faut pas toucher à ses idoles. Je préfère me construire ma propre histoire plutôt que d’être confronté à leur réalité.