La mode se rem’bobine
Être féru·e d’histoire permet de proposer une lecture inédite des événements qui se déroulent sous ses yeux, comme le prouve Clara Riff, une “wannabe historienne” (c’est ainsi qu’elle s’autoproclame) rassemblant 25 000 abonné·e·s sur TikTok. Alors que la plupart des comptes #fashion se contentaient de distribuer les bons (et les mauvais) points lors du dernier Met Gala, en mai, elle a mobilisé ses connaissances historiques pour remettre les tenues arborées à cette soirée new-yorkaise dans leur contexte social. “Dès l’annonce du thème (“Superfine : Tailoring Black Style”, ndlr), plusieurs mois avant l’événement, j’ai compris que ce serait un sujet délicat, potentiellement glissant, raconte-t-elle. J’avais des craintes concernant les risques d’appropriation culturelle. Je me suis plongée dans des recherches approfondies, car j’avais déjà commencé, en amont, à explorer l’histoire du dandysme, en particulier celle du dandy noir. Certaines références m’ont immédiatement sauté aux yeux le soir du gala, comme celle de Julius Soubise (1754-1778, ndlr), figure marquante de l’histoire du dandysme et de la mode. Cela me tenait à cœur d’inclure cette partie historique, plutôt que de me contenter d’une simple analyse mode de l’événement.” Une vidéo dans laquelle on apprend que le chapeau de paille du rappeur Bad Bunny, appelé “pava”, n’était en rien une excentricité, mais un hommage politique à ses racines portoricaines, et une critique de l’américanisation de son pays. Les connaissances de Clara l’autorisent à lancer quelques disquettes à la fast-fashion, comme cette autre vidéo où elle montre que Zara copie sans vergogne un bracelet de 1936 signé Meret Oppenheim pour la maison Schiaparelli : “C’est aussi une manière d’apporter quelque chose d’un peu plus rare sur les réseaux sociaux : recontextualiser historiquement ce que l’on voit. Cela permet d’aller au-delà du simple jugement esthétique – ‘c’est beau’, ‘c’est moche’, ‘c’est tendance’ – pour proposer une approche plus profonde et plus informative.”