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Avec un certain goût du risque teinté de fun et de provocation, Oscar Lesage est autant à l’aise dans des blockbusters internationaux (“The Crown”, saison 6) que dans des séries françaises (“Bardot”). Et ça, c’est quand il ne prend pas le mic’ pour s’essayer au rap. Rencontre avec une bombe d’acteur avant la déflagration.

Le timing est serré. Après l’interview, Oscar Lesage doit filer dare-dare à un cours d’escrime, préparation à un film d’époque dont il n’est pas autorisé à parler. Et puis, il y a cette grosse série pour Netflix dans laquelle il a un petit rôle… mais dont là encore il n’a pas le droit de causer. Pas simple d’être acteur à l’heure des embargos. Mais cela n’empêche pas le comédien de 27 ans d’être cash en interview. Tant mieux, c’est ce qu’on était venu chercher, au-delà de son regard sombre et pourtant si bleu surmonté de cheveux en bataille : du chien, de la fraîcheur. En grattant sur YouTube, on tombe sur ses raps véloces et crus dans lesquels il évoque “sa dégaine de plouc”, son adolescence passée “tout seul dans sa déprime, couvert de Biactol” ou comment “gravir les échelons sans piston”. C’est vrai que ce fils d’une Anglaise tombée amoureuse d’un entrepreneur mulhousien fait presque figure d’exception dans le milieu du cinéma. Après des rôles dans les séries comme Marie-Antoinette ou Bardot, ou au cinéma (Les Amandiers, Annie Colère), les choses s’emballent sérieusement pour Oscar : une série avec Clive Owen bientôt sur Canal+, un film suédois ou le prochain long métrage de Coralie Fargeat… Ça part dans tous les sens. C’est le but : tout faire pour ne pas se laisser coincer dans une case.

MIXTE. Éclaircissons un point tout de suite. Tu es rappeur ou acteur ?
OSCAR LESAGE. J’ai du mal à me dire rappeur. Pour moi, c’est un mot important. Il se mérite. Non pas qu’être acteur soit anodin. Mais pour devenir comédien, j’ai fait huit ans d’études, deux écoles de théâtre… Je me suis formé. Et puis, j’ai l’impression que c’est très facile de s’autoproclamer rappeur·euse. Tout le monde l’est un peu aujourd’hui, non ?

M. C’est d’ailleurs une réflexion que tu as sur ton titre “Wiseman” où tu dis : “Eh ouais, j’fais du rap comme 99 % des mecs de ma génération”…
O. L. Parfois, ça me donne envie d’arrêter (rires). À quoi je sers moi dans tout ça ? Je dis souvent que je n’ai pas envie d’être un mouton, de faire comme tout le monde, et pourtant je fais du rap. Sûrement parce que c’est un endroit où je peux m’exprimer autrement qu’en jouant la comédie. Au cinéma ou au théâtre, on se met au service d’un·e metteur·euse en scène. Mais on reste un tout petit élément de la machine.

M. C’était comment de grandir à Mulhouse ?
O. L. En fait, j’ai grandi à la campagne, en dehors de Mulhouse. J’ai eu une enfance paisible. En revanche, en arrivant à Paris, j’ai très vite pris conscience du regard que portent les Parisiens sur les provinciaux. J’ai mis du temps à assimiler les codes. La manière de parler, de fonctionner, le rapport aux autres… Tout est différent ici. Pour une certaine jeunesse parisienne, tout ça, c’est inné… Et le milieu du cinéma est excessivement parisien. Si tu n’as pas grandi dans la capitale, beaucoup de choses t’échappent.

M. Les nepo babies, ça t’agace ?
O. L. C’est pas grave d’être “une fille ou un fils de” mais c’est évident que c’est plus facile pour elles·eux. Bon, si t’es mauvais·e, ta carrière ne va pas durer vingt ans. Léa Seydoux est l’une de mes actrices préférées, et je me fous qu’elle soit une “fille de”. Elle me bouleverse. De plus en plus, d’ailleurs. Dans un film comme France, je la trouve hypnotisante, magnétique. Même dans le James Bond Mourir peut attendre, elle m’a tiré des larmes !

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M. À quel âge t’es-tu dit : “Je serai acteur” ?
O. L. À mon premier cours de théâtre. J’avais 9 ans et c’était le paradis. J’ai tout de suite compris que c’était fait pour moi. C’était tout ce qu’on m’interdisait à l’école. Alors en Terminal, quand il a fallu mettre une orientation professionnelle sur la feuille, j’ai écrit “acteur”. Presque sur un coup de tête. En classe, je faisais tellement le clown que les profs ont compris. Et puis, j’ai eu la chance d’avoir des parents qui m’ont soutenu. Ils ne m’ont jamais parlé de fac ni demandé de réfléchir à un plan B.

M. Tu avais des modèles d’acteur ?
O. L. J’adorerais te répondre un truc stylé. Mais la vérité, c’est que j’étais hyper fan de Hayden Christensen…

M. Attends, le gars qui a joué Dark Vador dans Star Wars ?
O. L. Celui qui jouait Anakin, ouais. C’est même pas un acteur génial, mais il m’a marqué. Je me suis donné un genre faussement ténébreux, j’ai laissé pousser mes cheveux pour lui ressembler… (rires) Ensuite, ça a changé, heureusement. Un de mes premiers chocs au cinéma, c’était L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford. Un western hivernal avec Brad Pitt. Je ne l’avais encore jamais vu comme ça au cinéma. Je me suis dit : “OK, le cinéma c’est pas que Jack Sparrow et Iron Man”.

M. Tu joues souvent des rôles en costumes. C’est par goût ?
O. L. Non. J’ai une “period face” comme disent les Anglais. J’en parlais récemment avec une autre actrice qui me disait qu’elle en avait marre qu’on ne l’appelle que pour des trucs en perruque. Moi, ça m’amuse de plonger dans une autre époque. Louis XVI, les années 1960 pour Bardot, les années 1980 pour Les Amandiers… Mais j’avoue que ça me réjouit de jouer un rôle actuel dans le prochain film de Fanny Ovesen (Laura, ndlr). J’ai pas envie de m’enterrer dans des histoires du passé, je veux faire un cinéma qui parle du monde d’aujourd’hui… Ce que je souhaite surtout, c’est capter, saisir des endroits à la fois infimes et sublimes de l’être humain. Bon, c’est un peu une grande phrase ça, non ? (rires)

M. Une belle gueule, c’est un atout ou handicap dans le cinéma français ?
O. L. Je sais que j’ai une gueule d’ange. Quand je suis arrivé au cours Florent, j’ai tout de suite voulu jouer les psychopathes, les Norman Bates. On m’a répondu : “Non, tu vas jouer Roméo”. Je trouvais ça super chiant. Depuis, j’ai appris à être plus stratège. On n’est pas maître de ce qu’on dégage, mais il faut réussir à travailler avec.

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M. Dans Les Amandiers ou dans la série Bardot, tu es très intense dans des scènes d’explosion de violence. Tu puises ça où ?
O. L.
La violence, c’est le truc le plus évident à jouer pour moi. Je suis quelqu’un de violent. Jamais envers les autres, mais envers moi-même. Je me suis déjà ouvert la main en frappant dans une vitre. Mais je ne sais pas me battre. Si quelqu’un venait me provoquer, je serais sûrement sidéré, avec le cœur qui bat à 100 à l’heure. Pour autant, c’est une émotion qui m’est familière. Dans Les Amandiers, lorsque Nadia (Tereszkiewicz) est poussée par terre, ça a fait naître en moi quelque chose d’instinctif. Il y avait une bonne part d’improvisation dans cette scène, même si l’imitation de Brando, elle, était prévue.

M. Pourtant, on ne te classerait pas dans la catégorie “acteur tourmenté”…
O. L.
Je ne suis pas de la même famille d’acteurs que Patrick Dewaere, non. Si on essaie de m’entraîner dans des zones obscures, qu’on me dit : “Il faut que tu te brûles pour ce rôle”, ça ne marchera pas. On vit une époque où l’on n’a plus à se détruire pour jouer. Certain·e·s réalisateur.rice·s ne l’ont peut-être pas encore intégré. J’ai le sentiment de faire partie d’une nouvelle génération de comédien·enne·s qui ne veut plus de ça.

M. Mais il y a encore des problèmes d’abus de pouvoir sur les tournages. Tu fuirais un·e réal à l’aura toxique, aussi célébré·e soit-il·elle ?
O. L.
Je ne pense pas que je le·la fuirais. Il y a quelque chose en moi qui aurait envie de se confronter à lui·elle. Mais je ferais tout pour ne pas devenir son pantin. C’est peut-être mon ego qui parle, mais je pense que je suis assez fort pour ne pas me laisser faire.

M. Est-on sorti·e·s, selon toi, de la période où l’on considérait les acteur·rice·s comme des choses ?
O. L.
Je l’espère. Mais ça se joue au-delà des réalisateur·rice·s. Par exemple, j’ai connu des profs de théâtre toxiques. Pas des fou·folle·s furieux·euses ou des pervers·es, mais des gens pour qui la frontière entre boulot et vie intime n’existait pas. Ça pouvait parfois faire mal certes, mais j’en sortais grandi. En revanche, ça a détruit des gens autour de moi. Des copains de cours que ces comportements ont dégoûté du métier d’acteur. Il y a une responsabilité des metteur·euse·s en scène et des profs de théâtre vis-à-vis de ces sujets. Il faut imposer des limites sans tomber dans l’excès inverse. Sur un plateau, je n’ai pas envie par exemple de travailler avec des gens trop précautionneux·euses ou effrayé·e·s à l’idée de me demander d’embrasser quelqu’un dans une scène.

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M. Justement, il y a un vrai débat autour des coordinateur·rice·s intimité sur les plateaux. Certain·e·s jugent leur présence intrusive. D’autres la voient comme quelque chose de rassurant et d’indispensable. Qu’en penses-tu ?
O. L. La première fois que j’ai travaillé avec une coordinatrice intimité, je me suis dit qu’elle allait me surveiller, se comporter en censeur sur le tournage. J’avais tort. Elle était tout aussi soucieuse de mon confort que de celui de l’actrice. Dans The Substance (le prochain film de Coralie Fargeat avec Demi Moore, ndlr), il y a des scènes dans lesquelles Margaret Qualley et moi on s’embrasse à pleine bouche. Mais à la seconde où on entend : “Coupez”, c’est fini. C’est un taf. Il y a comme une montée de mouvance un peu puritaine. Sur les réseaux sociaux, des gens s’offusquent de la gratuité des scènes de sexe dans certains films. Mais il y a des scènes de sexe sublimes au cinéma ! Elles ne sont pas essentielles à la trame narrative, et alors ? Un film, ce n’est pas que raconter une histoire. Godard disait : “Il y a des gens qui racontent des histoires. Moi, je montre des histoires.”

M. Crois-tu qu’on en demande trop politiquement aux acteur·rice·s ?
O. L. Le cinéma est politique ! On fait ce métier pour des raisons profondes. On a vocation à parler du monde. Mais j’aurais du mal à m’exprimer sur un sujet que je ne maîtrise pas. Je crois que souvent on confond polémique et politique. Et la polémique, c’est rigolo deux minutes, mais ça ne m’intéresse pas. On nous parle des clashs sur Twitter, de Maïwenn ou Houellebecq qui disent des dingueries à la télé, mais ça, c’est pas de la politique, c’est juste du spectacle.

M. C’est quoi pour toi l’audace ?
O. L. On présente souvent l’audace comme quelque chose de payant. L’audacieux·euse va forcément aboutir à ses fins, renverser un système. Mais c’est du storytelling. Un truc romantique qu’on se raconte. Moi j’ai vu des gens faire preuve d’audace et échouer lamentablement. Sans aucune grâce. Dans une espèce de gêne très contagieuse.

M. La dernière fois que tu as été audacieux, c’était quand ?
O. L. Je suis parti en Italie pour rencontrer Nanni Moretti. Je voulais lui offrir une chanson pour son prochain film. C’était dans le cadre d’une formation de comédien. Il fallait partir un mois et faire un truc un peu fou. Bref, j’ai trouvé son adresse en le stalkant un peu. J’ai sonné à son interphone et il m’a engueulé. J’ai passé plusieurs jours dans son quartier avec une guitare et un panneau qui disait : “Je compose une chanson pour Nanni Moretti”. Finalement, j’ai réussi à lui parler cinq minutes dans un resto. Ça a donné la chanson “King Gelato” que j’ai mise sur Spotify.

COIFFURE : ASAMI MAEDA @ WISE & TALENTED. MAQUILLAGE : NOLWENN QUINTIN @ WALTER SCHUPFER MANAGEMENT. ASSISTANT PHOTOGRAPHE : MATHEUS AGUDELO. DIGITECH : ANDREAS GEORG. ASSISTANTE STYLISTE : FRANCESCA RICCARDI.

Cet article est originellement paru dans notre numéro fall-winter 2023 AUDACITY (sorti le 26 septembre 2023).