DIOR FW24

Comme chaque saison, Paris a clôturé le fashion month de la mode masculine. Entre les démonstrations de force des géants Dior et Louis Vuitton, les statements politiques de GMBH et Burc Akyol, les shows intimes de Rick Owens et Lemaire, et la consécration de jeunes labels français comme Louis Gabriel Nouchi et EGONLab., retour sur cinq jours de créativité bouillonnante. Ici, c’est Paris !

À en croire les collections masculines présentées à la fashion week de Paris, la mode a envie de nous redonner le goût des saisons d’antan. Alors que l’hiver dernier, les mecs se désapaient, laissant apparaître ici et là de la peau (no pants, torses nus et consorts), cette saison, ils se couvrent vénèr comme le montrent les couches et surcouches, longs manteaux, vestes et tops bien épais (voire poilus) aperçu·e·s sur les runways. Une façon pour la mode de nous dire qu’elle se préoccupe du changement climatique et qu’elle souhaiterait revivre de vrais hivers bien rudes et bien froids ? C’est ce qu’on pourrait croire en voyant la fausse neige qui est tombée à la fin du défilé Louis Vuitton. Hélas, ce serait bien là en filigrane le seul propos pseudo-politique, tant l’industrie ne semble même plus faire semblant de s’intéresser aux problématiques sociales et environnementales actuelles. Car excepté le magnifique statement pro-palestine de GMBH, rien de bien engagé à l’horizon (on se demande même où sont passés les mannequins plus-size qui étaient beaucoup plus présents la saison dernière comme l’a une nouvelle fois souligné le mannequin Silvano Frere sur son compte Instagram). Ce qui est sûr en revanche, c’est que Keiona, gagnante de Drag Race France saison 2 (notre fierté nationale), s’est imposée comme l’une des nouvelles queens du style. Que ce soit en front row chez Louis Gabriel Nouchi, EGONLab., Sean Suen, Juun J ou encore GMBH, elle a tout simplement dead ça. Cela dit, s’il n’y avait qu’une seule chose à véritablement célébrer cette saison, ce serait sans aucun doute la richesse que Paris détient en termes de créativité et de diversité, comme en témoignent les designers de toute origine qui y ont défilé. Mais ces derniers ne sont pas les seul·e·s à avoir foulé le catwalk puisque d’autres quidams ont eux aussi marché dans la rue dimanche 21 janvier. En ce jour de clôture de la fashion week, il·elle·s n’étaient pas là pour présenter une collection mais bien pour manifester et défendre les immigré·e·s face à la loi immigration, dont une bonne partie vient d’être censurée par le Conseil Constitutionnel. Une lueur d’espoir dans un océan de sombres nouvelles. Rappelons-le haut et fort : si une telle loi avait été appliquée par le passé, la fashion week homme de Paris — qui compte actuellement près d’une cinquantaine de designers étranger·ère·s — n’aurait certainement pas la même gueule.

1. LE BIG FOUR COCORICO
Louis Vuitton FW24

Le far west selon Louis Vuitton
Direction plein ouest avec Pharrell Williams qui, pour sa troisième collection pour Louis Vuitton homme, a rendu hommage à la garde-robe western nord-américaine : chapeaux de cowboy, bottes monogrammées Timberland, workwear, denim, chaps pants, chemises à franges ou à carreaux. Le tout complété par des techniques de broderie et d’ornements histoire de pimper tout ça un peu plus luxe, quoi. NB : la collection a été créée en collaboration avec des artistes des nations Dakota et Lakota, que ce soit à travers les accessoires ou même la mise en scène et la bande sonore du défilé. L’imagerie du Far West et du cowboy conquérant qui s’assoit à la même table que les natifs américains autrefois tués et exploités, ce serait pas le temps de la réconciliation ? Certainement, à en croire Pharrell qui, encore en plein “LVers” trip, nous a fait le coup du discours qui prône l’amour. Mais comme nous le rappelait si bien la grande Bell Hooks : “Il ne peut pas y avoir d’amour sans justice”.

Dior FW24

Le ballet de Dior
Si vous voulez de la poésie et du savoir-faire, vous pouvez toujours compter sur Kim Jones. Le designer de Dior homme a une nouvelle fois marqué la saison avec un show spectaculaire rendant hommage aux danseurs de ballet (d’où les mannequins qui portaient des ballerines, duh !) et qui présentait pour la première fois du prêt-à-porter mais aussi les premières tenues couture pour l’homme. Une collection toute en fluidité et en volume avec pour la plupart des silhouettes tailoring (fentes, plis, décolletés, doubles boutonnages), mais aussi des combinaisons zippées en laine ou des mailles côtelées en peau de vache. Le tout dans un camaïeu de gris réhaussé de touches de couleurs vives (rose, bleu, jaune, vert) et de broderies et d’ornements. Bref, de la simplicité et de la beauté. Le clou du spectacle : le catwalk circulaire qui, pour le final, a commencé à s’élever et à tourner dans tous les sens sur le banger “Dance of the knights” du compositeur russe Sergueï Prokofiev. Tournez manège mais version haut de gamme, t’as vu.

Hermès FW24

Le dandy d’Hermès
L’hiver prochain, l’homme Hermès par Véronique Nichanian est un dandy chic but make it english : des carreaux, du gris avec des touches de violet, d’orange et de jaune. Quant à la table des matières, le cuir lisse et le tweed, of course viennent souligner les coupes droites et près du corps, même dans les jeux de superpositions. Bref, y’a rien qui dépasse ou alors tout en subtilité, un col ou un pan de chemise qui tombe tout en délicatesse.

Givenchy FW24

Givenchy retrouve Hubert
Pour cette collection “inter designers” signée par l’atelier (because Matthew Williams is no longer en charges des collections), la maison s’est rapprochée de l’ADN de son fondateur. Si le vestiaire de monsieur Hubert de Givenchy devait reprendre vie en 2024, il ressemblerait à la collection automne-hiver 2024-2025. La silhouette numéro un est d’ailleurs un hommage à la blouse historique du créateur lorsqu’il travaillait dans son atelier, tandis qu’un top à imprimé chats, fait office de clin d’œil à sa passion pour l’animal. Efficace.

2. DE L’INTIME ET DU PERSONNEL
GMBH FW24

Le statement de GMBH
En 2024, la mode peut-être encore politique comme le prouvent les fondateurs de GMBH, Serhat Işık et Benjamin Huseby. Ces derniers ont en effet donné, en amont de leur défilé, un discours courageux, poignant et puissant dénonçant le retour des nationalismes et de l’extrême droite en Europe, ainsi que la montée de l’islamophobie et de l’antisémitisme, la guerre et le sort désastreux et mortifère réservé aux Palistien·ne·s. L’émotion était plus que palpable chez les designers et dans la salle, où certain·e·s invité·e·s ont fini en larmes. D’autant plus parce que la collection en elle-même, baptisée “Untitled Nations”, qui défilait juste après, suivait le propos pro-Palestine et anticolonialiste des deux créateurs musulmans. On a ainsi vu défiler des vestes inspirées du keffieh traditionnel, des manteaux aux épaules robustes avec des cagoules protectrices ou encore des t-shirts avec une pastèque dégoulinante (ensanglantée ?) faisant écho à l’emoji utilisé pour parler de la Palestine sur les réseaux. À l’heure où la mode semble ne plus vouloir se confronter aux problématiques sociales et politiques actuelles, et où certains médias comme le WWD – pour ne pas le citer – déversent dans leur review leur islamophobie crasse en comparant une des vestes à poches multiples de la collection à “un gilet de kamikaze” (oui, on en est là), GMBH nous a démontré que malgré l’adversité, on pouvait encore être un jeune label indépendant à la fois talentueux et véritablement engagé. Sans doute la meilleure manière ever de clôturer la fashion week et d’envoyer bouler les fachos de la fachon. Period.

RICK OWENS FW24

Les 25 ans de Rick Owens
Pour l’automne/hiver 2024, Rick Owens a décidé de fêter ses 25 ans de carrière en toute intimité, et ce en accueillant uniquement 100 invité·e·s dans sa propre maison parisienne. La collection baptisée Porterville, rendant hommage à sa ville natale californienne, a vu défiler des sortes de soldats utopiques, gonflés et robustes tout droit sortis d’un film de science-fiction intergalactique : combinaisons à capuche, pulls plus grands que nature avec lettrage “Porterville”, tops à épaulettes pointues, grosses couvertures en guise de manteaux etc. Sans oublier les fameuses chaussures expérimentales en forme de ballon gonflé confectionnées en collaboration avec le designer londonien Straytukay. Du grand Owens qui nous a donné envie de crier le chant de la House qui porte son nom au sein de la scène Ballroom française : “Owens, ayo yo yo ! Owens in the building ! I said Owens, ayo yo yo !”.

LEMAIRE FW24

La quiétude de Lemaire
Contrairement aux saisons précédentes, Lemaire a quitté le campus Pierre et Marie Curie à Paris pour organiser son défilé Automne/Hiver 2024 dans ses propres bureaux, situés en plein cœur du marais. Une façon intimiste de se réapproprier complètement son narratif en proposant aussi un catwalk circulaire blanc assorti au décor intérieur, donnant tout de suite aux invité·e·s une sensation de calme et de quiétude. Une sensation amplifiée par les pièces de la collection elle-même qui appelaient, dans un jeu de délicatesse et de désinvolture chic, à célébrer le quotidien, la simplicité et la portabilité : layering, tissus respirants, cotons aérés, soies fluides, flanelles de cachemire, laines moussues. Un véritable moment suspendu et éthéré qui a fait soupirer de joie et d’admiration une bonne partie de la salle et qui a confirmé que la simplicité, la douceur et le minimalisme, ça a souvent du bon. Comme dans Top Chef, le vainqueur n’est pas forcément celui qui met le plus de sauce.

AMI FW24

Le Paris carte postale d’Ami
Dire qu’Alexandre Mattiussi, le designer d’Ami, est un passionné de Paris serait un euphémisme. La preuve avec ce nouveau show où il a rendu une fois de plus hommage à la ville lumière et plus particulièrement à ses habitant·e·s (mères, ados, grands-pères, ami·e·s, voisin·e·s, passant·e·s…) incarné·e·s ici par la cabine de mannequins composée entre autres de Diane Kruger, Malick Bodian, Laetitia Casta ou Lou Doillon. Ces dernier·ère·s, habillé·e·s de costumes croisés noirs et marron, de manteaux aux épaules fortes, de débardeurs moulants ou de jupes-culottes plissées, se sont déplacé·e·s dans un décor carte postale reproduisant une façade d’immeuble parisien typique au lever du jour. Le tout au son de leurs talons martelant le sol, agrémenté de chants d’oiseaux matinaux et de bruits de bicyclettes. C’était doux. C’était cute.

SANKUANZ FW24

Le retour aux sources de Sankuanz
Pour l’automne-hiver 2024, Sankuanz nous a fait une petite leçon d’Histoire et de tradition. Remontant à ses racines, le créateur chinois a proposé une silhouette ample et généreuse mêlant tailoring et streetwear, tout en rendant hommage aux vêtements traditionnels de l’empire du milieu : drapés traditionnels tibétains sur les manteaux, sweat-shirts et vestes redéfinissant l’essence de l’Orient avec un sentiment de modernité, col croisé qui rappelle les foulards khata tibétains etc. Et pour compléter le tout, Sankuanz, en collaboration avec les artistes d’ENCOR Studio, a présenté, à travers une installation lumineuse éthérée au cœur du lieu du défilé, une réinterprétation du paysage du vénéré Kangrinboqê, montagne sacrée dans la religion bouddhiste.

3. LA JEUNE SCÈNE PARISIENNE EN FORCE
LOUIS GABRIEL NOUCHI FW24

Louis Gabriel Nouchi
Louis Gabriel Nouchi (LGN pour les intimes, ma belle) nous a désormais habitué·e·s à s’inspirer d’ouvrages issus de la grande littérature pour réaliser ses collections : American Psycho, A Single Man et maintenant Bel Ami de Maupassant pour l’automne-hiver 2024. Résultat, que fait-on avec de la grande littérature ? Et ben, on fait de la grande mode. On ne sait pas si c’est le fait d’avoir gagné le grand prix de l’Andam l’année dernière, mais Louis Gabriel Nouchi semble s’affirmer et se peaufiner de plus en plus chaque saison, que ce soit sur ses références et inspirations (juste ce qu’il faut de kinky et d’homo-érotico) et sur son savoir-faire (couples impeccables, volumes maîtrisés). Et comme si ça n’était pas assez, il a présenté cette saison pour la première fois, ses toutes premières silhouettes dédiées à la femme. Et que dire de sa cabine de mannequins ? Une masterclass en diversité de corps, d’âge, de genre et d’origine, magnifiée entre autres par Raja et Coco Rocha. Ovah.

EGONLAB. FW24

EGONLab.
Chez EGONLab. l’hiver sera punk/rock/grunge ou ne sera pas. Jouant entre le strict et le fluide, ou entre une multitude de couleurs et du noir ultra-profond (hello les neuf looks dark qui ont ouvert le show), les deux créateurs Florentin Glémarec et Kevin Nompeix ont sans doute proposé une nouvelle silhouette qui redéfiniera la mode masculine dans les années à venir : des power coats ornés de ceintures extra longues, des blazers illusion cintrés à la taille, des drapés/foulards à motifs accrochés à des cerceaux dorés, des jeans sales, des tricots torsadés surdimensionnés ou encore des crop tops en laine et des manteaux en cuir à franges ultra-longues. Ça respirait la nouveauté et la liberté (et aussi la désobéissance et le gros fuck) à 10km à la ronde.

BURÇ AKYOL FW24

Burc Akyol
Avant de présenter sa collection, Burc Akyol a pris soin d’écrire personnellement les notes de son défilé. Un texte dans lequel le jeune créateur d’origine turque fait son propre état des lieux de l’industrie de la mode mais aussi de la France. Idéal pour comprendre en quelques minutes les problèmes liés aux mesures politiques françaises actuelles (what’s up Darmanin ?). Trés engagé quant à la question de ses origines et de sa culture, Burc a donc présenté sa collection baptisée “Made in Dreux”, reflet de son éducation dans les années 1990 dans cette ville située à environ 80 km de Paris. Résultat, les vêtements classiques sont transformés en pièces plus élaborées : un manteau en laine noire court et construit avec un panneau avant allongé, une veste en peau lainée qui se transforme en cape asymétrique, ou encore un tricot zippé avec une longue queue qui rappelle les smokings à cravate noire. Que dire de plus, c’est classe et c’est bien fait.

OUEST PARIS FW24

OUEST Paris
Hourra ! Ouest Paris, la marque fondée par Arthur Robert (ancien du studio Ami) vient d’intégrer le calendrier officiel de la fashion week parisienne. L’occasion pour le designer français de présenter une collection inspirée par une soirée à Paris, soit un mélange de la vie nocturne parisienne et des fêtard·e·s en after qu’on croise le matin au réveil dans les rues de la capitale. Comment ça se traduit ? Par exemple, avec l’idée d’enfiler un manteau par-dessus la tenue de la nuit précédente. Dans son ensemble, la collection comprend des vestes Rancher, des jeans cowboy, des pantalons cargo et des parkas, ainsi que des pièces plus ajustées comme des vestes et des manteaux à double boutonnage. Petite nouveauté : OUEST Paris a aussi annoncé sa première collaboration avec CAHU, le fabricant de sacs basé au Canal Saint Martin. Bref, on est paré·e·s pour teufer.

4. TOILES DE FOND
Loewe FW24

Pour l’hiver 2024, on prend l’option arts plastiques ou rien. Chez Loewe, où Jonathan Anderson aime mixer les styles et les références, les hoodies et les pantalons revêtent les toiles pop de Richard Hawkins, artiste américain qui mêlent histoire, pop culture et porno et dont les tableaux ornaient le set design du défilé. Chez l’Homme Plissé Issey Miyake où les vêtements immaculés devenaient une toile, on a fait appel au pinceau de l’artiste Ronan Bouroullec pour son trait en totale harmonie avec le plissé magistral de la maison. Olivier Rousteing a quant à lui invoqué le talent de l’artiste basé à Accra, Prince Gyasi et apposé ses fresques colorées sur des manteaux et costumes. Chez Kid Super, on a fait plutôt dans l’abstrait avec des couleurs solaires ou dans le pointillisme qui ornent les manteaux. Plus subtil enfin, chez Yohji Yamamoto, des pin up peintes sur les manteaux se sont glissées dans cette collection qui rend hommage aux archétypes de l’artiste. À vos pinceaux.

BALMAIN FW24, BALMAIN FW24, HOMME PLISSÉ ISSEY MIYAKE FW24, HOMME PLISSÉ ISSEY MIYAKE FW24, KIDSUPER FW24, KIDSUPER FW24
5. Au(x) poil(s) !
Rhude FW24, AMI FW24, Bluemarble FW24, Givenchy FW24, Juun J FW24, System FW24

Puisqu’apparemment l’hiver prochain il va falloir se couvrir, une flopée de marques a décidé de nous proposer des manteaux ou des tops avec toutes sortes de poils : longs, drus, fluffy, courts, bouclés etc. Une façon de s’approprier la tendance mob wife mais version masculine ? Quoi qu’il en soit, de Givenchy à Bluemarble et Rick Owens, en passant par Ami, System, Juun J, Rhude, Gmbh, Sacai ou encore Louis Gabriel Nouchi, le poil est partout. Tant qu’il est ni dans main et ni dans la bouche…

6. Tu sowrs de mon burweau !
Valentino FW24, Feng Chen Wang FW24, Sean Suen FW24, Botter FW24, Auralee FW24

Le mantra de la saison ? Go au bureau but make it chill. De retour au cœur des considérations mode après des années de “confort wear”, l’office wear a retenu certaines leçons. Chez Sean Suen, on déconstruit subtilement le costume en faisant dépasser un caleçon ici, en nouant un foulard en ceinture, là. Avec ces costumes marrons, ornés d’un badge et d’un hoodie décontracté, le label japonais Auralee souhaite incarner “le débauchage”, ce moment de détente où l’on s’apprête à rentrer chez soi. Et si chez Feng Chen Wang on se lance le défi de réinventer la chemise blanche en la twistant avec du cuir, chez Botter, on rentre du boulot en bombers et bonnet (hey ho). De son côté, l’office wear de Pierpaolo Piccioli pour Valentino vient interroger la masculinité. « Je veux donner aux hommes une nouvelle grâce et une nouvelle douceur », a déclaré le créateur au sujet du costume, uniforme des normes patriarcales… Jusqu’en 2024 ?

7. LE PUNK FLAMBOYANT

(

JEANNE FRIOT FW24 (crédit photo Gabrielle Langevin)

Avec notre favorite Jeanne Friot en tête, la tendance punk flamboyant, qu’elle soit esthétique ou politique, s’affirme de plus en plus sur les catwalks parisiens. La créatrice française queer a présenté sa collection “Coming Out” au sein du Rex Club à Paris, en balançant ici et là des messages pro-queer et féministe. Un gros fuck à l’ordre établi qu’on retrouve aussi chez Kidill, Doublet et Walter van Beirendonck où la figure du punk mélange trash et douceur, noir et couleurs, pour accéder au firmament de la flamboyance.

Doublet FW24, Doublet FW24, Kidill FW24, Kidil FW24, Walter van Beirendonck FW24, Walter van Beirendonck FW24
8. JE SUIS UN HOMME DE COULEURS
BLUEMARBLE FW24, BALMAI FW24, BOTTER FW24, VALENTINO FW24, HOMME PLISSÉ ISSEY MIYAKE FW24

Le bleu céruléen
L’hiver prochain, le bleu n’est pas turquoise, n’est pas lapis mais bleu céruléen. C’est la super référence au Diable s’habille en Prada que la rédactrice en chef de Nylon France Elizabeta Tudor a repéré sur les podiums. Effectivement, les manteaux Bluemarble et Balmain, les mailles Issey Miyake, Botter et Valentino ou encore les accessoires chez Vuitton, Auralee, Dior et Marine Serre ont tous pour point commun ce bleu ciel intense issu du cobalt. De quoi faire grimper le style au septième ciel.

BALMAIN FW24, BLUEMARBLE FW24, HOMME PLISSÉ ISSEY MIYAKE FW24, KENZO FW24, SANKUANZ FW24, SONGZIO FW24

Rouge c’est rouge
Déjà partout chez la femme, on sonne désormais l’alerte rouge chez l’homme. Chez Balmain, Bluemarble, Sankuanz, Songzio, Issey Miyake ou encore Kenzo, le rouge est un statement qui s’assume de la tête aux pieds histoire de mieux capter l’attention.

JUNYA WATANABE FW24, AMIRI FW24, BOTTER FW24, DRIES VAN NOTEN FW24, OFFICINE GÉNÉRALE FW24, RHUDE FW24

Être marron
Effet Charlie et la chocolaterie (ou pas), le marron c’est le nouveau noir. Chez Junya Watanabe, Ami et Kolor, il rhabille le costume tandis que chez Marine Serre, Taakk et San Quanz, il s’éveille en rondeurs et délicatesse. Faut aimer.

RICK OWENS FW24, AMIRI FW24, AURALEE FW24, DRIES VAN NOTEN FW24, SACAI FW24

La palette pastel
Si la palette de l’hiver est low profile, elle n’en n’est pas beige pour autant. Rose poudré, amande, jaune clair ou lilas, les couleurs pastels ont apaisé les silhouettes chez Sacai, Dries Van Noten, Maison Mihara Yasuhiro, Amiri, Rick Owens ou encore Isabel Marant. Décliné sur des coupes larges et des matières fluides, le pastel d’hiver apporte un peu beaucoup de douceur dans ce monde de brutes.

9. Se prendre une veste collège
RHUDE FW24, UNDERCOVER FW24, WHITE MOUNTAINEERING FW24, WALES BONNER FW24, KENZO FW24

Non, la ‘varsity jacket” n’est pas l’apanage des boomers. La preuve chez White Mountaineering, Rhude, Wales Bonner, Kenzo ou encore Undercover où elle donne un ton légèrement régressif. On habille son col rond d’un col camionneur, d’un col de chemise ou d’une capuche de hoodie en arborant fièrement ses initiales sur le cœur. Oui parce que la mode, c’est avant tout une histoire d’amour entre vous et le vêtement (lol).

10. LES FRENCHIES EN OFF
GUNTHER FW24

Il n’y a pas que le calendrier officiel de la fashion week dans la vie. Il y a aussi le calendrier off. Et cette saison, ce sont deux marques françaises qui ont marqué la sélection. D’un côté un habitué, Gunther, qui s’est inspiré de “l’effervescente époque du jazz et de l’atmosphère envoûtante des speakeasies des années 20” pour nous proposer des pièces modernes avec un soupçon de rétro (costumes, longs manteaux croisés, chemises taillées avec précision). De l’autre, Drôle de Monsieur, qui a défilé pour la première fois après 10 ans d’existence et qui proposé une collection mélangeant minimalisme et maximalisme, élégance et opulence. Exemple : un look full denim, façon cowboy macadam, qui contraste avec une tenue inspirée du Studio 54 de la tête aux pieds. Un grand écart bien maîtrisé.

DRÔLE DE MONSIEUR FW24
11. LA CONSTANCE JAPONAISE
COMME DES GARÇONS FW24

La “Non-toxic Masculinity” de Comme Des Garçons
En plein milieu du calendrier, le dernier défilé de Comme des Garçons Homme Plus a offert un rare moment d’accalmie. Une parenthèse sans grandes effusions, drama ou manifestations exubérantes. Résultat, on a pu contempler cette collection en reprenant notre souffle, apaisé par le rythme lent des mannequins. La veste tailleur, presque omniprésente parmi les 40 looks, se déclinait en jeux d’asymétries, de plis, de découpes et de trompe-l’œil. Comme des éclats qui structurant ces silhouettes en noir et blanc, des tissus argentés, broderies de boutons, pantalons à volants et mailles ajourées venaient ponctuer le noir et le blanc de la collection. La rigueur de Rei Kawakubo est loin d’être austère ; elle dessine le portrait d’une masculinité à la fois délicate et sereine, bien loin du virilisme toxique ambiant. Et ça fait du bien.

SACAI FW24

Sacai nous envoie du love
Brillante démonstration d’équilibre et de justesse pour Chitose Abe avec sa collection United as One / One Love présentée vendredi dernier au Carreau du Temple. C’était une véritable déclaration d’amour pour l’uniforme, adoptant une approche monochromatique radicale, qui permet d’attirer immédiatement le regard sur la forme des silhouettes. Si cette stratégie souligne l’intelligence technique de la designer, la collection ne manquait pas pour autant de sensibilité. La preuve avec les formes rondes et douces, les teintes pastels, les broderies rappelant un tricot ultra douillet, ou encore le matelassage allant jusqu’à évoquer le confort d’un oreiller, encouragent un sentiment de quiétude et d’harmonie. Cerise sur le gâteau, la marque qui affectionne les collaborations en a profité pour dévoiler une série d’écussons réalisés avec l’artiste Mark Gonzales, ainsi que des paires de derbies et de bottes en collaboration avec J.M. Weston.

MAISON MIHARA YASUHIRO FW24

L’elixir de jeunesse selon Maison Mihara Yasuhiro
Où s’arrête l’enfance, où commence l’âge adulte ? Souvenez-vous de ce moment où vous commenciez à chiper les affaires de votre grand-frère, grande sœur ou d’un parent, et du plaisir ressenti en essayant ces « vêtements de grands » pour la première fois. Entre l’émerveillement enfantin et le goût de l’interdit, la dernière collection de Mihara Yasuhiro incarnait cette ambivalence propre à l’adolescence. Le designer s’est amusé avec les rapports d’échelle en habillant les mannequins de vestes exagérément longues, les transformant en enfants terribles munis de petits sacs-doudou. La collection était aussi un voyage dans les années 80/90 avec des fourrures de lurex résolument disco cohabitant avec des matières délavées aux accents grunge. Un mélange des genres qui pose un regard tendre sur notre maladresse enfantine, tout en nous invitant peut-être à s’affranchir du carcan des modes pour redécouvrir cette facilité à expérimenter avec notre style vestimentaire.