À en croire les collections masculines présentées à la fashion week de Paris, la mode a envie de nous redonner le goût des saisons d’antan. Alors que l’hiver dernier, les mecs se désapaient, laissant apparaître ici et là de la peau (no pants, torses nus et consorts), cette saison, ils se couvrent vénèr comme le montrent les couches et surcouches, longs manteaux, vestes et tops bien épais (voire poilus) aperçu·e·s sur les runways. Une façon pour la mode de nous dire qu’elle se préoccupe du changement climatique et qu’elle souhaiterait revivre de vrais hivers bien rudes et bien froids ? C’est ce qu’on pourrait croire en voyant la fausse neige qui est tombée à la fin du défilé Louis Vuitton. Hélas, ce serait bien là en filigrane le seul propos pseudo-politique, tant l’industrie ne semble même plus faire semblant de s’intéresser aux problématiques sociales et environnementales actuelles. Car excepté le magnifique statement pro-palestine de GMBH, rien de bien engagé à l’horizon (on se demande même où sont passés les mannequins plus-size qui étaient beaucoup plus présents la saison dernière comme l’a une nouvelle fois souligné le mannequin Silvano Frere sur son compte Instagram). Ce qui est sûr en revanche, c’est que Keiona, gagnante de Drag Race France saison 2 (notre fierté nationale), s’est imposée comme l’une des nouvelles queens du style. Que ce soit en front row chez Louis Gabriel Nouchi, EGONLab., Sean Suen, Juun J ou encore GMBH, elle a tout simplement dead ça. Cela dit, s’il n’y avait qu’une seule chose à véritablement célébrer cette saison, ce serait sans aucun doute la richesse que Paris détient en termes de créativité et de diversité, comme en témoignent les designers de toute origine qui y ont défilé. Mais ces derniers ne sont pas les seul·e·s à avoir foulé le catwalk puisque d’autres quidams ont eux aussi marché dans la rue dimanche 21 janvier. En ce jour de clôture de la fashion week, il·elle·s n’étaient pas là pour présenter une collection mais bien pour manifester et défendre les immigré·e·s face à la loi immigration, dont une bonne partie vient d’être censurée par le Conseil Constitutionnel. Une lueur d’espoir dans un océan de sombres nouvelles. Rappelons-le haut et fort : si une telle loi avait été appliquée par le passé, la fashion week homme de Paris — qui compte actuellement près d’une cinquantaine de designers étranger·ère·s — n’aurait certainement pas la même gueule.
Le far west selon Louis Vuitton
Direction plein ouest avec Pharrell Williams qui, pour sa troisième collection pour Louis Vuitton homme, a rendu hommage à la garde-robe western nord-américaine : chapeaux de cowboy, bottes monogrammées Timberland, workwear, denim, chaps pants, chemises à franges ou à carreaux. Le tout complété par des techniques de broderie et d’ornements histoire de pimper tout ça un peu plus luxe, quoi. NB : la collection a été créée en collaboration avec des artistes des nations Dakota et Lakota, que ce soit à travers les accessoires ou même la mise en scène et la bande sonore du défilé. L’imagerie du Far West et du cowboy conquérant qui s’assoit à la même table que les natifs américains autrefois tués et exploités, ce serait pas le temps de la réconciliation ? Certainement, à en croire Pharrell qui, encore en plein “LVers” trip, nous a fait le coup du discours qui prône l’amour. Mais comme nous le rappelait si bien la grande Bell Hooks : “Il ne peut pas y avoir d’amour sans justice”.
Le ballet de Dior
Si vous voulez de la poésie et du savoir-faire, vous pouvez toujours compter sur Kim Jones. Le designer de Dior homme a une nouvelle fois marqué la saison avec un show spectaculaire rendant hommage aux danseurs de ballet (d’où les mannequins qui portaient des ballerines, duh !) et qui présentait pour la première fois du prêt-à-porter mais aussi les premières tenues couture pour l’homme. Une collection toute en fluidité et en volume avec pour la plupart des silhouettes tailoring (fentes, plis, décolletés, doubles boutonnages), mais aussi des combinaisons zippées en laine ou des mailles côtelées en peau de vache. Le tout dans un camaïeu de gris réhaussé de touches de couleurs vives (rose, bleu, jaune, vert) et de broderies et d’ornements. Bref, de la simplicité et de la beauté. Le clou du spectacle : le catwalk circulaire qui, pour le final, a commencé à s’élever et à tourner dans tous les sens sur le banger “Dance of the knights” du compositeur russe Sergueï Prokofiev. Tournez manège mais version haut de gamme, t’as vu.
Le dandy d’Hermès
L’hiver prochain, l’homme Hermès par Véronique Nichanian est un dandy chic but make it english : des carreaux, du gris avec des touches de violet, d’orange et de jaune. Quant à la table des matières, le cuir lisse et le tweed, of course viennent souligner les coupes droites et près du corps, même dans les jeux de superpositions. Bref, y’a rien qui dépasse ou alors tout en subtilité, un col ou un pan de chemise qui tombe tout en délicatesse.
Givenchy retrouve Hubert
Pour cette collection “inter designers” signée par l’atelier (because Matthew Williams is no longer en charges des collections), la maison s’est rapprochée de l’ADN de son fondateur. Si le vestiaire de monsieur Hubert de Givenchy devait reprendre vie en 2024, il ressemblerait à la collection automne-hiver 2024-2025. La silhouette numéro un est d’ailleurs un hommage à la blouse historique du créateur lorsqu’il travaillait dans son atelier, tandis qu’un top à imprimé chats, fait office de clin d’œil à sa passion pour l’animal. Efficace.