À 28 ans, le londonien d’origine ghanéenne Campbell Addy s’impose comme le nouveau prince de la photographie. Dans son livre « Feeling Seen », il dévoile ses clichés, chargés d’énergie, de poésie et de vérité, et son histoire personnelle, marquée par l’affirmation de soi et la volonté de célébrer la culture queer noire.

Ses images nous donnent des feelings, tout comme un bon vieux son de Drake à l’époque de « Take Care » en 2013, quand il n’était pas encore certifié « lover boy ». Terriblement puissants et doux à la fois, les clichés du photographe Campbell Addy nous amènent dans une dimension où la vulnérabilité est une force et la différence une fierté. Il aura fallu peu de temps au britannique d’origine ghanéenne pour convaincre le monde de la photographie et de la mode que sa superbe vision de la culture queer noire méritait d’être exposée ailleurs que juste sur un compte Instagram. Aujourd’hui à 28 ans, Campbell Addy peut se vanter (même si il est bien trop humble pour ça) d’avoir photographié des artistes comme FKA Twigs, Beyoncé, Tyler, The Creator et d’avoir vu son travail en couverture de I-D, ou dans les pages d’autres publications comme Dazed, British Vogue et la plateforme Nowness qui a partagé son travail de réalisateur (yes boy, ce génie fait aussi des films). Son livre « Feeling Seen » (Prestel, Juin 2022) qui regroupe une partie de ses portraits et photos de mode et qui s’ouvre sur un avant-propos du grand Edward Enninful (rédacteur en chef du British Vogue, qui a largement contribué à faire du Vogue UK l’une des meilleurs éditions, notamment en donnant une place majeure à la représentation de la diversité) fait office d’adoubement pour Mr Addy, qui mérite un front row à lui tout seul.

FKA Twiggs
Campbell Addy, portrait.

« Feeling Seen » évoque le croisement entre la photographie, la race, la beauté et la représentation. Aux côtés des clichés de Campbell Addy et de citations de personnalités noires de premier plan, dont Naomi Campbell et Nadine Ijewere qui expliquent s’être senties « vues » réellement à travers son objectif, se tisse l’histoire personnelle du britannico-ghanéen. Élevé par sa mère avec ses trois frères au sein d’une communauté de témoins de Jéhovah – son père, musulman, était reparti vivre dans son pays natal- Campbell Addy a dû cacher son homosexualité durant toute son enfance et adolescence. Outé à 17 ans après que l’un de ses frères ait trouvé une photo de lui et de son boyfriend cachée dans sa chambre, il est menacé par sa famille d’être envoyé au Ghana – où l’homosexualité est illégale et consacrée comme un crime – pour vivre avec son père, ce qu’il ne considère même pas comme une option. Animé par le besoin d’affirmer qui il est et de vivre comme il l’entend, Campbell trouve quelque part le courage de quitter sa famille et sa maison pour rejoindre une association LGBTQ qui vient en aide aux jeunes sans domiciles rejetées par leurs familles. Il habitera plusieurs années chez Richard Field, un homme gay (et un peu son ange gardien) qui vit dans le sud de Londres. C’est le même Richard Field qui l’encouragera à développer sa passion et son talent pour la photographie et l’incitera à rejoindre les bancs de la prestigieuse école Central Saint Martins en 2013. Campbell Addy travaille d’ailleurs actuellement sur l’écriture d’un scénario retraçant son enfance et son adolescence, qui mérite bien d’être portée sur à l’écran. The man of the Year vous dîtes? Fort.

Tyler, The Creator