Avec sa première collection “Return to sender” (retour à l’envoyeur en VF), le designer Bobby Kolade, créateur de la marque Buzigahill, transforme les fringues de seconde main massivement exportées depuis les pays Occidentaux en Ouganda. Lancée en avril, la marque a dévoilé ce mois-ci son troisième drop de créations uniques réalisées en collab avec des réfugiées sud-soudanaises.

Quand Bobby Kolade est retourné vivre à Kampala en 2018 après avoir vécu 13 ans entre Paris et Berlin, il avait en tête de créer une marque de vêtements made in Ouganda, à partir de coton Ougandais et pour les Ougandais. Le designer, diplômé de l’Academy of Arts Berlin Weissensee et passé par Maison Margiela et Balenciaga à Paris, en a finalement décidé autrement en prenant conscience du flot continu de fripes venus d’Occident. Dans ce pays d’Afrique de l’Est, 80 % des vêtements achetés sont de seconde main et les fabricants locaux ne peuvent pas rivaliser avec les fringues d’occasion, bien moins chères là-bas aussi. Alors en réaction à la surconsommation des pays du Nord, Bobby Kolade récupère des fripes chez des importateurs de vêtements à Kampala, puis avec son équipe de 5 couturières, les découpent, les rafistolent et les transforment en création uniques. Après un premier drop révélé en avril, un second en août, Buzigahill, nommée d’après une colline de la capitale Ougandaise, vient de sortir une troisième série, toujours dans la collection « Return to sender ». On y retrouve des pièces déjà signatures comme le sweat à quatre faces ou les chemises en patchwork. Pour cette nouvelle série d’une vingtaine de créations, Buzigahill a collaboré avec des artisanes réfugiées du Soudan du Sud. L’idée de la marque est aussi de booster les chaines d’approvisionnement locales et de créer des industries puissantes et créatives dans le pays.

Certaines pièces ont ainsi été réalisées avec des broderies faites par le Yangani Women’s Group et le Miyala Project, deux groupes d’artisanes sud-soudanaises réfugiées au camp Bidibidi au Nord-Ouest de l’Ouganda. Ces broderies sont directement inspirés des Milayas, ces draps de lits réalisés à la main au Soudan du Sud et dans lesquels les réfugiées ont porté leurs affaires quand elles ont quitté leur maisons dévastées par la guerre en 2016. Aujourd’hui les sud-soudanaises continuent de broder ces draps aux motifs complexes et colorés dans le camp de Bidibidi. Passionné par les produits faits-mais Ougandais, Bobby Kolade a aussi créé une organisation à but non lucratif, Aiduke Clothing Research, un commerce en ligne destiné à aider les autres créateurs ougandais à accéder à un public international. Et il ne semble pas vouloir s’arrêter là. Son objectif ? Créer d’ici 10 ans, des petites usines spécialisées partout dans le pays pour promouvoir l’artisanat local.