1. PRATIQUER L’ART DE LA JOIE
Le jour du shooting, la météo est aussi glaçante que l’actualité mondiale. Malgré l’atmosphère anxiogène marquée par le dérèglement climatique et la sobriété énergétique, il se dégage du plateau une énergie bouillonnante. Sur le set, on sent d’où vient la chaleur : non pas d’une danse de vandales, mais des équipes de Simonagun qui s’affairent à diriger quatre jeunes danseuses autour du thème de la transe. Concentration au maximum, mouvements fluides : Grace, Lou, Mélodie et Myana improvisent ensemble ou en solo sous l’objectif de Charlotte Navio. L’émotion est palpable, et lorsque plus tard on demande aux professionnelles, en loge, leur définition de la transe par la danse, elles évoquent toutes un sentiment de bien-être et de lâcher-prise. Selon Mélodie, il s’agit de retrouver un safe space : “Inconsciemment, on pense à un endroit où l’on se sent bien, qui est chaud et qui ramène à l’enfance. Pour moi, c’est ma chambre.” Lou, qui accède à l’état de transe la plupart du temps lorsqu’elle est seule, s’en sert comme “d’une thérapie” pendant laquelle elle peut se mettre “à crier ou à pleurer d’un coup”. Le remède pour soigner la grande dépression ? Si elle est pratiquée dans le cadre de thérapies depuis les années 1960, la transe a plus récemment débarqué dans l’enseignement supérieur français (cours d’initiation donnés à Paris VIII depuis novembre 2021). Une première mondiale, que l’on doit en partie à Corine Sombrun, ethnomusicologue, fondatrice du TranceScience Research Institute en 2019 et autrice de plusieurs livres, dont La Diagonale de la joie (éd. Albin Michel) qui relate son expérience d’apprentie chamane en Mongolie. Devenue experte en la matière, elle continue d’introduire la pratique dans des domaines cliniques pour soulager les douleurs chroniques ou les patients oncologiques.