2. Faire part de son engagement
“Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours donné mon opinion et milité d’une manière ou d’une autre contre les injustices. Mais je sais qu’au début, c’était surtout une question de survie. Adolescente, je me faisais une certaine image de la France et de l’Europe. Mais quand je suis arrivée du Congo chez ma tante, dans un trou paumé en Picardie, j’ai déchanté en me prenant de plein fouet les réflexions racistes des habitants d’une région où presque tout le monde vote Le Pen. On se moquait de mes cheveux, de mon accent… C’est là que je me suis mise à prendre la parole, sur Facebook à l’époque. J’avais besoin de m’exprimer et d’extérioriser tout ça. Et je ne voulais surtout pas subir les mêmes restrictions que ma tante qui, par le passé, avait dû faire profil bas pour éviter les problèmes. C’est comme ça que j’ai commencé à me battre contre mon école et mon entourage. Puis, par sa diversité, le milieu de la danse m’a montré qu’il y avait beaucoup plus que ce côté négatif dans le paysage français. Avec les années, j’ai pu apprendre l’histoire très politique des danses comme le krump, le disco, le waacking, etc., ou des scènes artistiques comme la ballroom. Aujourd’hui, que ce soit sur l’antiracisme, le féminisme, le sexisme, l’appropriation culturelle ou le body positive, j’essaie autant que possible et à ma manière d’éduquer les gens et mes followers. Et toujours dans la joie, le rire et la bonne humeur. Je crois d’ailleurs qu’à terme, j’aimerais bien créer un one-woman show qui mêle danse, humour et engagement.”
3. Imposer son propre style (vestimentaire)
“En septembre 2020, j’ai présenté en off de la Fashion Week parisienne la première collection de Tantine de Paris. Cette marque que j’ai créée, c’est comme l’extension par le vêtement de ce que j’exprime sur scène quand je danse. J’ai toujours été un peu la meuf reloue aux looks excentriques qui voulait mettre de la couleur partout et qui critiquait les silhouettes trop sombres des gens. On me disait : “T’es trop une tantine !” C’est de là qu’est né le nom de ma marque. Je voulais vraiment créer ma mode à moi, qui mêle à la fois mon amour de la couleur, de l’extravagance et de la culture de la sape kinoise et congolaise. Alors, j’ai commencé à faire mes propres sapes pour mes prestations lors de compétitions au sein de la scène ballroom parisienne. Tout le monde me disait : “J’adore comment tu t’habilles, c’est trop bien ce que tu portes…” Dans ma tête, il y a eu comme un déclic. Je me suis dit : “Okay, je vais créer ma propre marque”, avec l’idée d’une mode flamboyante et joyeuse qui ne se prend pas au sérieux. Et si ça plaît aux autres, tant mieux. Sinon, OSEF ! Mais ce détachement lié à la création ne sauve pas tout. Je n’ai pas fait d’école de mode et ça a été l’une des premières difficultés auxquelles j’ai dû faire face. En France, quand tu n’as pas de diplôme qui prouve tes compétences et ton expertise, on ne t’aide pas, on ne te soutient pas. J’ai été rejetée par plusieurs institutions, mais c’était mal me connaître de penser que ça m’arrêterait. Quand je crois à quelque chose, j’y vais à fond, jusqu’au bout, quitte à me planter. Le fait est que les gens ont vraiment apprécié la première collection, plus particulièrement la communauté LGBT+ qui m’entoure. J’ai une vision très claire pour Tantine de Paris. Ma deuxième collection est en cours de confection. Mais elle ne sera pas prête à temps pour la prochaine Fashion Week. Je ne veux simplement pas me presser.”