“I’m too kunt, I’m too fast, I’m the one, I eat bitches straight for lunch”, chante Hanabi The K dans son nouveau single “Walk B*tch”, sorti le 12 mars 2024. Le ton est donné, renforcé par un clip haut en couleurs et looks couture, filmé en partie dans l’agence de mannequin Success Models, où est justement signé l’artiste. Mannequin, chanteur, danseur de voguing, drag… Mais qui est cette nouvelle sensation pop venue de la Ballroom scene et bientôt incontournable ? Interview-portrait de ce K si spécial.
Mixte. Tu es aujourd’hui connu pour être une des figures emblématiques de la scène Ballroom parisienne. Comment as-tu intégré le milieu ?
Hanabi The K. Je faisais déjà de la danse hip hop et dancehall en amateur avant de rencontrer quelqu’un en 2015 via les réseaux qui m’a parlé pour la première fois de voguing. Je n’en avais jamais entendu parler mais j’étais intrigué et l’ai suivi à un training. J’ai tout de suite été attiré par cet univers, mais en même temps je ne m’assumais pas du tout, donc j’avais très peur d’y retourner. Je n’ai pas résisté longtemps puisque j’ai participé à mon premier ball en 2016, puis j’ai intégré à l’époque la House of Ladurée (aujourd’hui nommée Legendary Maison Owens, ndlr).
M. En quoi la Ballroom t’a aidé à prendre confiance en toi et à assumer qui tu es ?
H.T.K. La Ballroom scene m’a apporté beaucoup de choses et m’a vraiment aidé à explorer qui je suis, même si cette exploration n’est jamais terminée puisque je considère qu’on est en constante évolution. À l’époque, je me demandais un peu si je voulais devenir une femme, par exemple. Aujourd’hui, je m’assume en tant que moi, en tant qu’être humain. Je ne cherche pas à me coller d’étiquette fixe de sexualité ou d’identité de genre.
M. Dans quelles catégories de la ballroom scene préfères-tu évoluer ?
H.T.K. J’ai commencé par du Vogue Fem mais je n’étais pas très doué. Puis je me suis mis au Runway et j’ai rapidement gagné des prix dans cette catégorie. Depuis un an, je fais aussi du Drag Performance : je suis sorti quatre fois ainsi, et j’ai gagné les quatre fois. Au départ, j’avais pourtant du mal en drag, avant de rencontrer une personne qui a complètement changé ma façon de me maquiller et ça m’a débloqué dans ma manière de danser en drag. Il s’agit de Fana The K, ma fille, mon premier enfant dans la ballroom.
M. Est-ce la ballroom qui t’a donné envie de te lancer dans la musique ?
H.T.K. J’ai longtemps eu du mal à danser sur les morceaux déjà existant, mais les MC ont toujours réussi à me faire kiffer et à m’ambiancer, en particulier mon father, Matyouz. C’est grâce à lui que j’ai eu envie de faire un premier morceau : “I am the mother”, sur lequel il est en featuring avec Lazy Flow. Au départ, c’était juste pour le fun car je n’envisageais pas du tout ça comme une carrière. Mais le son a marché beaucoup plus que je n’osais l’imaginer : il compte 182K streams sur Soundcloud aujourd’hui. Ça m’a motivé à en faire un deuxième : “My Bitch” ft. DJ Capital Kaos Majorette Cunt. Le photographe David Hugonot Petit m’a proposé d’en réaliser le clip, et ça m’a donné envie de me professionnaliser jusqu’à sortir aujourd’hui mon nouveau titre “Walk B*tch”.
M. Justement, comment t’es-tu professionnalisé ?
H.T.K. Un jour où je défilais pour Tantine de Paris, la marque de Mariana Benenge, j’ai rencontré Lala &Ce à qui j’ai fait part de mon envie d’enregistrer de nouveaux morceaux. Elle m’a donné le contact de l’équipe de production Motif Music. Pendant trois mois j’ai tenté de les joindre, mais ils avaient un problème de téléphone. Et puis un jour, ils ont fini par décrocher et m’ont parlé des prix pour enregistrer dans leur studio. Je n’avais pas les moyens, donc je leur ai juste envoyé des liens de mes clips en espérant que ça leur donne envie de me rencontrer. Et ça a marché : on a commencé à travailler ensemble sur des choses que j’avais écrites. Ils ont senti que j’avais davantage à proposer au-delà du voguing. C’est comme ça qu’on a enregistré “Can I just get your love” et “Sweet”. Comme on commençait à partir dans plein de directions dans le but de créer un album, j’ai écrit toute une histoire avec sept personnages de super héros comme autant de mes personnalités. Je leur ai présenté ce concept et c’est devenu le fil conducteur de mon projet, Seven K.
M. Tu sembles mélanger plein d’influences dans ton travail. Quelles sont tes inspirations ?
H.T.K. J’aime beaucoup Ariana Grande, Aya Nakamura et Shay. Mais je m’inspire aussi de ce qui se fait en Corée, au Brésil et au sein de plein d’autres cultures. Je suis également passionné par Naruto. C’est de là que vient mon nom de scène d’Hanabi d’ailleurs. Je vois ma musique comme un voyage à travers mon monde, le kunty world. Mes sons s’avèrent plus ou moins cunty, nasty, sad ou joyeux. C’est comme un jeu vidéo où il y aurait plusieurs cartes à explorer. Je passe aussi bien de l’électro à la pop ou au piano-voix. J’emprunte aussi au Voguing, au Funk Carioca, à la House…
M. En quoi consiste ton processus créatif ?
H.T.K. J’ai vraiment voulu prendre mon temps pour construire cet album, ça s’est fait de manière très progressive. D’abord, j’ai écrit les paroles, parfois autobiographiques, parfois inspirées de fiction, et c’est ce qui a inspiré des instrus à Motif Music. Quand je crée, j’ai aussi des images plein la tête et c’est pour ça que je trouve les clips très importants aussi. J’ai produit tout seul “Walk B*tch” et j’ai fait des pieds et des mains pour qu’on y ait des looks aboutis car c’est un hymne à l’assurance et à la célébration des Runway Divas. J’ai notamment appelé Casey Cadwallader pour qu’on puisse être habillé·e·s en Mugler, ce qu’il a tout de suite accepté, en clin d’œil à mon appartenance à la House Miyake-Mugler. On y porte aussi du Windowsen, une autre marque que j’adore.
M. Tu as aussi récemment entamé une carrière de mannequin et tu as commencé à défiler pour de nombreuses marques ces dernières saisons. Quel est ton rapport à la mode ?
H.T.K. Je suis devenu mannequin à une époque où je ne me sentais pas encore complètement à l’aise avec moi-même. Mais le mannequinat m’a aidé à apprendre à me connaître. J’évolue dans une super agence, Success Models, qui m’a toujours soutenu et vu grandir. Aujourd’hui, je défile que pour des maisons où je peux être vraiment moi-même. La mode inspire beaucoup la Ballroom scene où les looks sont toujours très importants et même les noms de Houses reprennent ceux de maisons de couture. Mais la Ballroom scene inspire aussi de plus en plus la mode : cette industrie fait toujours plus appel à nous pour défiler, ou pour participer et performer à des événements. Récemment, on a fait un ball avec Success Models et Egonlab pour UGG par exemple. Ce sont vraiment des univers concomitants que j’adore entrecroiser, comme vous pourrez l’entendre dans mon premier album à paraître le 18 juillet 2024…